Paul De Louis
Diapason, France
juin 2014
PERFORMANCE
RECORDING

Le titre exact donné par Pierné à son quintette (1916) est Quintette en trois parties pour piano, deux violons, alto et violoncelle. La précision n'est pas insignifiante: on y lit l'unité de l’œuvre et l'égalité des instruments. Ce monument au pays basque, construit autour du rythme impair de zortzico, a connu des interprétations superbes qui exploraient les tréfonds de sa matière musicale, comme Jean Hubeau et les Viotti (Erato), ou fouaillaient ses élans postromantiques comme Christian Ivaldi et les solistes luxembourgeois (Timpani). La nouvelle venue se place sur un autre plan : incitée peut-être par l’indication « Très lointain » qui ouvre le deuxième mouvement, elle s'adresse aux yeux de l’imagination plus qu’aux élans du cœur. Cette lecture plus évocatrice qu'affective doit beaucoup à la gamme de nuances et au jeu de pédale de Piers Lane : à sa finesse, à ses fortissimos jamais durs et à l’interaction qu’il établit, non seulement avec le quatuor comme un groupe, mais avec chacun de ses membres, réalisant à la perfection l’intention de l'œuvre. De même, les Goldner savent, dans une polyphonie où le passage de relais est fondamental, préserver la sonorité de chacun tout en créant une texture à la fois symphonique et diaphane. En dépit de l'écriture pianistique virtuose, les Australiens apparentent davantage le quintette aux œuvres d'orchestre qu a l’Etude de concert pour piano : grâce à eux, l'écriture de Pierné cousine avec Debussy plus quelle n'hérite de Franck. Appliquée au Quatuor op. 12 (1894) du jeune Louis Vierne, la même lumière douce dissipe les pénombres post-franckistes pour révéler de multiples détails d'harmonie et de travail thématique. Elle rend enfin évidente la filiation fauréenne qu'on pense trop rarement à chercher chez Vierne. La belle palette tamisée nous fait espérer que ces cinq-là en continueront l'exploration avec les sublimes Quintette de Vierne et Trio de Pierné.