Michel Stockhem
Diapason, France
janvier 2017

Alban Gerhardt avait déjà servi devant les micros le premier dieu de son enfance, Pablo Casals (Hyperion, 2011). Signant un joli texte d'introduction, il paie cette fois son tribut à Mstislav Rostropovitch, donc la rencontre et les enregistrements l'ont inspiré, complétant, à ses dires, une formation plutôt "analytique" reçue en Allemagne, L'album tient de la gageure. La maitrise accomplie de Gerhardt, encore trop peu reconnue en France, le porte à la hauteur de tous les enjeux. Or enjeux il y a ici: les bis de Slava étaient exigeants à la fois techniquement et musicalement. Quelques partitions sont d'ailleurs inédites, que le violoncelliste russe interprétait 'à sa sauce'—une sauce qui, finalement, se trouve au goût du sérieux virtuose allemand.

Le résultat nous enchante: niveau technique ébouriffant—intonation, précision rythmique—et avec cela une fantaisie qu’on ne connaissait pas forcément à notre violoncelliste. Très bien secondé par l’excellent Markus Becker, il amuse, charme, enthousiasme, émeut. Et cela sans une once de vulgarité. Tout ici parait … simple. De ces ‘Encores’ pour la plupart fameux, on détachera deux petites pièces de Rostropovitch lui-même: l’Humoresque de jeunesse qu’il offrit à son maitre Kozolupov, et une étude composée dans les années 1940 (Moderato) publiée a Moscou en 1972 seulement. Dans la transcription du Clair de lune par le maitre russe, le Gofriller de Gerhardt fait tout autant merveille. Quant à La Danse des elfes de Popper, eh bien! Personne ne la joue avec tant d’esprit aujourd’hui. Un peu de musique française achève de nous convaincre: le Scherzo de jeunesse de Debussy, ses Minstrels dérangés par Slava et la Pièce en forme de habanera de Ravel.

Prise de son très proche, avec un piano un peu ‘serre’, mais au moins on ne perd rien de l’aventure.