Martine Mergeay
Diapason, France
janvier 2016

Virée polonaise dans la série fleuve d'Hyperion. Emil Mlynarksi est l'exemple du musicien post-romantique, cosmopolite et cultivé. Né en Lituanie (alors territoire russe) en 1870 et mort à Varsovie en 1935, formé à St Petersbourg où il fit ses débuts, il s'établit en Pologne en 1897 (année de son premier concerto pour violon) d'où il mena de front une carrière internationale de chef d'orchestre, de compositeur et de professeur. Pour la petite histoire, sa fille épousa Arthur Rubinstein avec lequel il entretient une collaboration artistique régulière et chaleureuse. Ses deux concertos furent composés à presque vingt ans d'intervalle; le premier pleinement inscrit dans la conception romantique du genre, avec des élans passionnés, une immense cadence (survenant très tôt dans l'Allegro initial), une virtuosité constamment sollicitée (mais avec goût) et un finale triomphant; le second toujours aussi flatteur pour le violon mais plus audacieux dans le traitement de l'orchestre, et perceptiblement influencé par Richard Strauss.

Aleksander Zarzycki, le second compositeur polonais joué ici, est né en Ukraine en 1834, étudia le piano à Berlin et connut une immense carrière de virtuose avant de s'établir à trente et un ans, à Varsovie. Son titre de gloire est la Mazurka endiablée (on songe à Wieniawski en plus consistant, notamment grâce au charme de l'orchestration) qui conclut le programme, précédée de l'Introduction et Cracovienne, simple et populaire comme il se doit.

Parmi les rares versions de ces concertos, la nouvelle venue a le mérite de souscrire à leur caractère romantique (parfois échevelé) en divisant le travail: par la qualité des vents et la souplesse de cordes, le BBC Scottish Symphony, placé sous la direction du Polonais Michal Dworzynski, cligne de l'œil vers Mendelssohn, Brahms ou Strauss; par sa virtuosité incandescente et l'intensité de son discours, le jeune Russe Eugene Ugorski pactise plutôt avec Tchaïkovski. Et de mouvement en mouvement, tous débordant de vie et d'engagement, la jonction s'opère dans une entente artistique réjouissante.